Paul Klee... en regardant un arbre
Conquérant - Paul Klee
Les œuvres écrites du grand peintre Paul Klee (1879 – 1940) portent évidemment et pour l’essentiel sur la théorie de l’art et plus particulièrement sur l’art pictural. Il a laissé aussi un journal dans lequel, à côté de souvenirs personnels, la réflexion sur la peinture et sur la musique est riche et passionnante. Musique, oui. Car il était d'une famille de musiciens et sa femme, Lily Stumpf, était pianiste renommée.
Mais il lui arrivait également, à l’occasion, de griffonner dans ses carnets de courts poèmes, d’inspiration très variée et de forme très libre. En voici quelques exemples, dont le premier (En regardant un arbre) trouvera parfaitement sa place chez l’oiseleur.
Nous pouvons jalouser les oiseaux.
Ils évitent
de penser au tronc et aux racines
et, contents d’eux-mêmes, se balancent toute la journée,
agiles,
et chantent aussi, sur les dernières-nées des ramilles.
OOOOO
Lève-toi tôt, pour semer.
Ta femme dort profondément.
Laisse-la dormir.
Ce n’est qu’en apportant les fruits de ton champ
que tu dois t’adresser à ta femme.
OOOOO
Eléphantastique
Mammouthique
Maraboulistique
Giganthologie
Centaurochs
Herculinaire
OOOOO
Il est deux montagnes
où tout est clair et lumineux.
La montagne des animaux et
la montagne des dieux.
Entre les deux s’étend la
vallée crépusculaire des hommes.
L’homme qui, un jour, regarde vers le haut
ressent une inextinguible nostalgie,
lui qui sait qu’il ne sait pas,
pour eux qui ne savent pas qu’ils ne savent pas,
et pour eux qui savent qu’ils savent.
OOOOO
Eloignez-vous, les grands rêves,
Va... et porte-toi bien, immortalité,
Ecroulez-vous, montagnes de l’esprit,
Si le sommet s’appelle solitude.
Traduction: Antoine Mack