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Airs de flûte
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7 juillet 2010

Histoire de deux grenouilles

 

Aviez-vous appris qu’en Inde, jadis, Barun (beau nom qui désigne le vent) et Bijuli (joli nom qui signifie le tonnerre) ont été mariés en grande pompe pour convaincre  Barun Devata, le dieu de la pluie, d’ouvrir enfin les écluses célestes restées désespérément fermées depuis de longues semaines? Les jeunes héroïnes de cette fête, deux grenouilles vertes, sont allées passer leur lune de miel dans une mare des environs du village où fut fêtée leur union, désireuses d’y accomplir leur mission en croassant des prières à l'adresse de Devata.

_sope

Lorsque l’incandescent soleil eut asséché cette mare, nous raconte Esope, l’immortel fabuliste grec, nos deux anoures ont décidé de chercher plus loin un meilleur point de chute.

Le soir du deuxième jour de leur escapade, les grenouilles sont arrivées au logis d’un fermier. Elles y ont trouvé un très grand bol de lait que l’homme réservait à l’écrémage. Sans attendre, nos champions du plongeon piquent une tête dans ce nectar et  entreprennent de se gaver.

Quand s’apaise leur soif et qu’elles veulent ressortir du profond récipient, voilà nos deux grenouilles prises au piège. La paroi du bol est bien trop lisse et, à chaque tentative de remontée, elles n’arrêtent pas de glisser vers le bas et se retrouvent à patauger dans le lait...

Pendant des heures, elles se fatiguent ainsi les cuisses. L’une d’elles (est-ce Bijuli? est-ce Barun? Esope ne semble pas  très doué pour déterminer le sexe des grenouilles...) finit par croasser:  "Toute notre agitation est vaine et le destin  nous est contraire. Je renonce." Elle ne fait plus le moindre mouvement, glisse malencontreusement au fond du bol et s’y noie.

La deuxième grenouille continue pourtant de lutter, avec l’énergie du désespoir, jusque très tard dans la nuit. L’aube pointe déjà quand elle sent sous ses pattes le premier morceau de beurre. Elle prend appui dessus, fait appel aux dernières forces qui lui restent pour se projeter vers le haut. Le saut réussit. Bijuli (ou Barun?) se retrouve libre.

 

Un peu triste aussi... Mais, n’insultons pas l’avenir, se dit la rescapée. Retournons au village: un autre mariage m’attend à coup sûr, si l’on veut toujours, là-bas, que Barun Devata fasse pleuvoir.

Antoine Mack

 

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Commentaires
B
Quand on n'a que l'anoure....
O
Je me demandais si l'occasion se présenterait... Merci, belle lurette!<br /> <br /> "J'ai deux anoures, un peu d'ail et du riz.<br /> Ce repas, toujours, vraiment me ravit".
B
On a les grenouilles (donc 4 cuisses), on a le beurre, ne manque plus que sel, poivre et un peu d'ail... Un peu frugal, mais quand il y a de l'anoure, on ne compte pas !
B
On a les grenouilles (donc 4 cuisses), on a le beurre, ne manque plus que sel, poivre et un peu d'ail... Un peu frugal, mais quand il y a de l'anoure, on ne compte pas !
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